Près d’un jeune actif sur deux ayant obtenu un CDI en France envisage de le quitter dans les deux prochaines années, selon une étude récente de l’Ifop. Les statistiques de mobilité atteignent des niveaux inédits, remettant en cause la stabilité longtemps associée à ce contrat. Les entreprises constatent une réévaluation rapide des priorités professionnelles chez les nouveaux entrants. Les critères de choix ne ressemblent plus aux schémas d’hier. Sens, équilibre de vie, flexibilité et impact écologique pèsent autant que la sécurité ou l’évolution de carrière. Les attentes se redessinent, poussant employeurs et institutions à revoir leur stratégie d’attractivité et de fidélisation.
La génération Z face à un monde du travail en pleine transformation
La génération Z foule le marché du travail avec une lucidité rare. L’époque où une stabilité à toute épreuve dictait les choix semble bien lointaine. Chocs sanitaires, urgence climatique, innovations déferlantes : la jeunesse actuelle n’hérite plus des repères d’autrefois, mais d’un terrain mouvant où chaque étape rime avec incertitude. Finies les certitudes simples, place à des attentes plus nettes et à l’esprit critique.
L’irruption de l’intelligence artificielle et la vague numérique brouillent les cartes. Les jeunes, ultra-connectés, avancent dans un univers où la concurrence s’intensifie, les postes évoluent vite, les parcours s’inventent au fil des révolutions. Décrocher un premier emploi relève de l’équilibre : apprendre à la volée, rebondir, s’adapter. Les secteurs comme la tech ou la santé changent de visage, tandis que les PME et groupes établis essaient de garder le rythme.
Trois grandes mutations façonnent aujourd’hui les trajectoires des jeunes actifs :
- Effet de l’IA et automatisation : une crainte, certes, mais aussi une chance pour ceux capables de pivoter et de se former en continu.
- Marché professionnel survolté : cycles accélérés, nouveaux métiers qui chassent les anciens, prise d’autonomie renforcée.
- Série de crises : confrontée à des chocs à répétition, la génération Z évolue dans un contexte perçu comme instable de façon chronique.
Cette instabilité, loin de provoquer la résignation, pousse les jeunes à remettre en cause leur rapport au travail, et à redéfinir ce qu’on attend vraiment d’une carrière.
Qu’est-ce qui motive vraiment les jeunes à accepter (ou refuser) un CDI ?
Pour les nouveaux actifs, décrocher un CDI cesse d’être une évidence. L’attachement quasi automatique à ce type de contrat s’affaiblit. L’équilibre personnel, la flexibilité et la santé mentale passent devant la promesse de sécurité.
La génération Z attend un salaire en phase avec ses compétences, mais veut aussi avoir des perspectives concrètes d’évolution et sentir que son poste a un sens. Prendre un CDI, souvent par choix stratégique, ne fait plus rêver tout le monde. Beaucoup explorent le freelance, les contrats courts ou combinent plusieurs activités pour garder la main sur leur destin.
Voici ce qui, dans les faits, influence la décision d’accepter un CDI :
- Être utile, aligné avec ses valeurs, préférer un employeur qui agit réellement sur le terrain du sens.
- La réelle possibilité de choisir ses horaires, de travailler à distance ou de moduler son rythme façonne la décision finale.
- Goût des expériences hors normes (VIE, graduate programs, mobilité internationale) ; pour beaucoup, multiplier les expériences reste une priorité.
Au final, le CDI reste dans la course, mais seulement quand il accepte d’être modelé selon les envies et les attentes des jeunes employés. Ceux-ci veulent faire entrer dans la norme la diversité des expériences, l’autonomie et la liberté d’alterner plusieurs formes de contrats.
Valeurs, attentes et défis : le portrait professionnel d’une génération en quête de sens
Impossible de passer à côté du rapport exigeant aux valeurs. Pour la génération Z, agir avec cohérence n’est pas négociable. Les entreprises doivent prouver leur sérieux sur l’écologie, la mixité, l’inclusion. Le sens ne se proclame plus, il se démontre à travers les actions, au quotidien. Prioriser la performance quitte à sacrifier sa santé mentale ? Hors limite.
Ce public réclame transparence et authenticité. On ne se contente plus de promesses ; on exige des engagements tangibles, un respect de la parole donnée. Le style de management, la place laissée à l’initiative, la capacité à valoriser et accompagner différemment comptent plus qu’un simple rattachement administratif. Si le contexte ne satisfait pas, la mobilité est immédiate et assumée.
Les attentes exprimées par cette génération s’articulent principalement autour de ces axes :
- Refus total du statu quo sur la parité et l’égalité des chances, à tous les échelons
- Impact réel du poste sur la société, en lieu et place du prestige ou du titre
Pour garder leurs jeunes collaborateurs, les employeurs doivent passer à l’écoute active, à la valorisation des profils atypiques et à la construction de parcours sur-mesure. Ceux qui investissent sincèrement dans ces démarches gagnent fidélité et motivation sur la durée.
Et si repenser le CDI devenait une opportunité pour les entreprises et les jeunes talents ?
Le CDI traditionnel séduit de moins en moins. Les attentes des jeunes sont ailleurs : souplesse, adaptabilité, modèles alternatifs. Beaucoup d’entreprises l’ont compris et inventent d’autres voies : contrats mixtes, missions courtes, solutions hybrides. L’employeur devient partenaire d’expériences, plus qu’autorité unique.
La formation continue s’impose désormais à toutes les étapes. S’endormir sur ses lauriers ? Personne ne le tolère. Les groupes misant sur des évolutions transverses, des parcours internes variés et la personnalisation marquent clairement des points auprès de cette jeunesse avide de progression. L’engagement sociétal n’est pas optionnel ; la responsabilité d’entreprise prend le relais du simple discours officiel. Ici, les actes et la transparence font toute la différence.
Quelques leviers s’avèrent efficaces pour répondre à cette aspiration de renouveau :
- Créer des parcours professionnels mêlant CDI, missions ponctuelles, projets et expériences hors-cadre
- Promouvoir la mobilité interne comme voie de progression et de fidélisation
- Faire de la formation continue le socle de chaque évolution, quel que soit le poste
Le mouvement ne ralentit pas : parcours à la carte, enrichis, CDI réinventés. Les entreprises qui sauront s’adapter sans perdre de vue leurs convictions seront celles qui réussiront à attirer et à fédérer l’énergie de cette génération en quête de sens, d’autonomie et de transformation. Difficile de savoir quelle sera la forme du CDI dans dix ans, mais une chose semble acquise : il n’échappera pas à la demande d’agilité et d’engagement portée par les talents de demain.


